Prouver son adresse à l’école

Comment prouver son adresse à une administration lorsque l’on n’est dans une ville que depuis 2 jours ? C’est à cette épineuse question que la journée d’hier a été consacrée, pour réussir à inscrire les enfants à l’école d’Evanston. L’école commence officiellement lundi, il nous fallait donc réussir à tout faire en une journée, on y est presque arrivés.

Résultats de recherche d'images pour « school bus »Il faut d’abord noter que toutes les personnes avec qui nous avions été en contact par mail étaient extrêmement accueillantes. Nous avions fait l’enregistrement en ligne selon leurs conseils, et l’inscription définitive semblait une formalité. Or, en arrivant, il nous manquait deux choses : le formulaire médical devant être rempli par un médecin ayant vérifié leur condition physique (pour les yeux et les dents, on pourra attendre un peu), et deux justificatifs d’adresse. Nous n’en avions qu’un, de notre logement.

Et ici, on retrouve deux questions déjà rencontrées ici : l’assurance santé, et la banque. En effet, l’assurance santé c’était le problème pour le document médical. Le service scolaire nous a donné une liste de cliniques où nous pouvions aller, nous sommes allés dans la plus proche, mais on nous a dit à l’accueil qu’il fallait d’abord vérifier auprès de notre assurance que nous étions éligibles pour cette clinique. Comme nous changeons Résultats de recherche d'images pour « kids medical exam »d’université, nous changeons d’assurance, nous n’avions rien sur nous, et l’expérience de la précédente dont il a été impossible d’avoir les informations. On a commencé à avoir des sueurs froides, car ce document médical est obligatoire pour commencer l’école. Je ne fais pas durer le suspens plus longtemps : nous nous sommes rappelés que nous avons une amie pédiatre à Evanston, qui était miraculeusement chez elle, et nous a sauvés en remplissant le papier à partir du carnet de santé des enfants (il s’agissait en gros de certifier qu’ils étaient vaccinés).

Ce problème résolu, nous nous attaquons au suivant : prouver notre adresse. L’administration scolaire demande quatre documents – mais ils ont bien voulu réduire la note à trois – qui consistent globalement à prouver son insertion économique. La dame énumère les possibilités : électricité, gaz, téléphone. Nous n’avons rien de tout ça, car nous habitons dans un appartement-hôtel mis à notre disposition par l’université. Voiture ? Non. Contrat de travail ? Sur la lettre d’engagement de l’université, c’est notre adresse de Paris qui apparaît. Compte en banque ? Nous avons celui du Vermont mais pas à la nouvelle adresse… Ca s’annonce compliqué. Nous commençons par demander de l’aide à l’université. Grâce aux téléphones portables et aux mails, ainsi qu’à la gentillesse de nos interlocuteurs, nous avons assez rapidement une lettre certifiant notre adresse. Et pour le troisième document, nous décidons d’ouvrir un nouveau compte en banque (après avoir appelé notre banque du Vermont en lui disant notre nouvelle adresse, mais ils ne sont pas en mesure de nous fournir rapidement un document portant celle-ci). Je la fais courte, mais la première dit non car nous ne restons pas assez longtemps, la seconde est d’accord, et se base sur la lettre de l’université pour garantir notre adresse. Pour prouver notre identité, nous présentons deux documents : le passeport, et une carte bancaire (preuve d’identité donc). Tout contents nous repartons vers les services scolaires. Il est 15h, ceux-ci ferment à 16h, tout va bien.Résultats de recherche d'images pour « pile de papiers »

Quand nous y arrivons, il y a beaucoup plus de monde que le matin. Bon, on attend. Vers 17h c’est notre tour, et là, la dame n’a pas reçu notre mail avec la lettre de l’université, le document n°2, que nous n’avons pas physiquement, et le téléphone qui la contient n’a plus de batterie. Comme l’inscription est très longue, nous la faisons en attendant que le téléphone se recharge, mais ¾ d’heure plus tard, il ne s’est toujours pas rallumé, il a décidé de nous compliquer la tâche. Je relis la liste affichée des preuves de résidence qui peuvent être soumises, et je vois qu’un achat en ligne convient. Euréka : ce sera la commande d’antivols de vélo faite la veille sur Amazon qui remplacera la lettre de Northwestern. Tout va bien, ils sont inscrits, mais il devront encore passer un test d’anglais pour savoir où ils seront envoyés. Ils ne commenceront donc que mardi à aller à l’école, mais ça ira.

Il y a quelque chose de vertigineux dans le fait de pouvoir remplacer une lettre d’une université prestigieuse disant que nous sommes officiellement invités (un document qui ne s’obtient donc pas facilement) par une facture de quelques dizaines de dollars sur Amazon. Cette expérience est une application pratique des travaux de Viviana Zelizer, encore elle, qui a décrit l’intrication de l’intimité et de l’économie. Elle s’est notamment Résultats de recherche d'images pour « zelizer purchase of intimacy »intéressée à la façon dont la justice établit les liens entre les personnes en se basant sur leurs relations économiques. Le versement des indemnités après le 11 septembre l’a passionnée : l’Etat américain a accordé des sommes très élevés aux familles des victimes. Lorsque les personnes étaient mariées, avaient des enfants, les bénéficiaires étaient faciles à définir, mais il y eu des contestations lorsque les personnes vivaient en concubinage. Elle raconte ainsi le cas d’une femme qui vivait avec une autre femme. Ses frères et sœurs, afin de toucher l’indemnité, ont affirmé que cette autre femme était sa colocataire, et n’avait donc pas de lien d’intimité avec la victime. La conjointe a alors produit des preuves du lien amoureux avec celle qui n’était pas juste une colocataire : compte bancaire commun, inscription commune au club de gym, factures en tout genre.

Mon collègue et ami Gilles Laferté a forgé la notion d’identification économique pour désigner la façon dont notre identification administrative s’est progressivement économicisée : l’ouverture généralisée de comptes en banque à la population en a fait un signal d’enracinement, et les vérifications faites par la banque valent pour vérifications administratives. L’historienne Orsi Husz décrit la façon dont en Suède, ce sont les banques qui ont délivré les premières cartes d’identité dans les années 1970, car il fallait prouver son identité pour utiliser les chèques et les services bancaires. Au Moyen-Age, raconte une autre historienne, Laurence Fontaine, les « sans feux ni lieux », étaient les seuls à ne pas pouvoir obtenir de crédits, qui à l’époque étaient généralisés en s’appuyant sur les liens d’interconnaissance et de dépendance. A l’époque contemporaine, l’identification économique ne passe plus par des témoins de bonne moralité, mais par les cartes bancaires, les abonnements téléphoniques et les achats sur internet. Ca permet de faire fonctionner un monde dans lequel les individus sont beaucoup plus mobiles, mais où en même temps il faut sans cesse prouver des formes d’enracinement. Ce qui est finalement le plus surprenant dans cette expérience scolaire est que la bureaucratie la plus classique perdure dans le pays de Google.

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High-Net-Worth-Individuals

J’ai appris la semaine dernière l’acronyme HNWI pour High-Net-Worth-Individuals. Je suis très en retard, il existe depuis plus de 10 ans. Il a été inventé dans le monde de la finance. J’adore ces créations de la langue anglaise – souvent venus du marketing, ça casse un peu le romantisme d’une langue qui spontanément se réinventerait chaque jour, mais ça reste un jeu linguiste très amusant.

Une traduction française synthétique d’HNWI serait « riches », mais là il faudrait définir la richesse (quels seuils ? Revenus ou patrimoine ? Niveau de vie ou mesure monétaire ? etc), je n’ouvre pas cette boîte de Pandore. Donc, tentons une traduction plus littérale : individus disposant d’un haut patrimoine. La limite dans le monde de la finance pour être un HNWI est d’avoir 1 million de dollars d’actifs à investir – donc, hors actifs immobiliers. Mais nous savons que le monde des hauts patrimoines est à la fois concentré (peu de personnes en détiennent une part gigantesque) et dispersé, c’est-à-dire que les plus fortunés des détenteurs de haut patrimoine possèdent plus de 1000 fois ce qu’ont les moins fortunés des plus riches (j’espère que c’est clair. Je mets un graphique pour illustrer). Pour rendre la catégorie HNWI plus opérante, les financiers ont donc inventé une sous(ou plutôt sur)-catégorie : celle des UHNWI, les Ultra-High-Net-Worth-Individuals, qui ont au minimum 30 millions d’euros à placer. Ils sont un peu moins de 180 000 sur Terre, quand les millionnaires sont environ 18 millions.

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Si la finance a inventé ce terme, c’est que ces personnes très riches sont l’objet d’une attention particulière : celle des banques privées. Elles ont toujours existé, mais elles se développent à toute allure depuis une vingtaine d’années. Les banques traditionnelles ont désormais toute une branche privée, les étudiants qui se forment aux métiers de la banque se ruent sur les formations « gestion de patrimoine », mais surtout, ces milliards font l’objet d’une ingénierie financière sans précédent. La sociologue Brooke Harrington a récemment publié Capital Without Borders qui est une enquête sur les « wealth managers », les gestionnaires de fortune, qu’elle est allée Résultats de recherche d'images pour « capital without borders »interroger dans 18 pays, dont nombre de paradis fiscaux, et qui lui ont raconté comment ils mettent l’argent des ultra-riches à l’abri. Elle explique que les plus riches cherchent à se protéger de trois risques : la fiscalité, leurs créanciers et la dilapidation par des membres de la famille (enfant dépensier ou divorce coûteux). Il faut y ajouter les risques de spoliation et de corruption dans les pays où comme le note avec ironie l’auteure, les richesses y ont précisément été construites en ne respectant aucune règle, mais il faut ensuite les en protéger.

Pour y parvenir, les financiers, globalement, rendent l’argent intraçable à l’aide de sociétés écrans, mais surtout de trusts, vieux système britannique inventé du temps où les chevaliers partaient aux croisades et destiné déjà à protéger leurs fortunes de tous les malheurs potentiels. Le principe du trust est que le bénéficiaire n’est plus propriétaire de ses avoirs et n’a aucun droit sur les choix d’investissements qui y sont fait. En revanche, il est bénéficiaire des dividendes. C’est un moyen idéal pour ne pas payer d’impôts mais aussi pour se déclarer en faillite et ne pas rembourser ses créanciers. Et il est possible de créer des trusts pour chaque membre de la famille.

Le livre d’Harrington est très intéressant sur son aspect politique : elle explique que les wealth managers vont jusqu’à participer à l’écriture des lois des pays dans lesquels ils officient. Leur rôle est de connaître les systèmes fiscaux et financiers de tous les pays du monde, afin de placer l’argent de leurs clients aux meilleurs endroits selon leurs besoins (acheter une maison à Londres, un yacht, garantir l’avenir des enfants conçus hors mariage, etc). Ils conseillent donc les législateurs sur la meilleure façRésultats de recherche d'images pour « bankers goldman sachs »on « d’attirer les capitaux », c’est-à-dire le plus souvent, sur la meilleure façon de diminuer voire d’abolir toute fiscalité. Cela se fait au détriment des habitants de ces pays – les seuls à continuer à payer des impôts – y compris dans les paradis fiscaux, où les Etats ne prélèvent quasiment plus aucune taxe sur les capitaux qui y circulent, et comme ailleurs diminuent les prestations sociales et les investissements publics. Comme le dit l’un des gestionnaires interrogés : ce sont les immobiles qui paient pour la mobilité des capitaux. Pour Harrington, lutter contre ces fuites de capitaux ne se fera qu’en s’intéressant à ces intermédiaires que sont les gestionnaires de fortune, pour les pousser à utiliser leurs compétences non à disperser les fortunes pour les rendre inatteignables, mais à les réintègrer dans l’économie et les circuits d’argent nationaux, y compris ceux de la fiscalité.

Résultats de recherche d'images pour « occupy wall street »Ce monde de la très grande richesse est en train de devenir un sujet d’intérêt pour la sociologie, qui longtemps a plutôt été vue comme une discipline s’intéressant aux plus pauvres. C’est une des preuves du sentiment généralisé que l’enrichissement sans fin d’une infime partie de la population mondiale, qui ne s’est pas arrêté en 2008, bien au contraire, provoque l’appauvrissement de tous les autres, et est au cœur de l’organisation des sociétés contemporaines et sans doute futures.

Avoir une fille en médecine

Ce week-end nous avons rendu visite à des amis américains qui passent leur été dans le Vermont dans une maison au milieu de la forêt, avec un petit étang pour se baigner et des oiseaux de toutes les couleurs parfaitement assortis au paysage. Nous les avions vus la dernière fois il y a huit ans, leur fille entrait au College (à l’université donc), et ils nous avaient dit qu’ils étaient contents car ils avaient économisé suffisamment pour être en mesure de financer ses quatre années d’études. Depuis, celle-ci a débuté des études de médecine (qui ici ont lieu après les 4 années de Collège). Elle vient de finir sa troisième année. Lorsque nous en parlons, je leur demande s’ils seraient d’accord pour que je leur pose quelques questions pour mon blog, car la question du financement des études est décidément centrale.

Résultats de recherche d'images pour « medical school er tv »Ils me disent qu’ils sont Américains, donc qu’ils veulent bien qu’on en parle… Soulignant que les tabous autour de l’argent ne sont pas les mêmes d’un pays à l’autre. Ce n’est pas qu’il n’y en a pas ici, mais pas autour de ce sujet. Donc, nous disent-ils, ils ont choisi de financer entièrement leur fille, ne lui demandant par exemple pas de travailler l’été ou pendant son année scolaire pour participer. Certains de leurs amis font d’autres choix, par exemple, quand les enfants sont au lycée, ils leur demandent de trouver des petits jobs afin d’économiser pour payer non les frais d’inscription mais le “room and board”, c’est-à-dire le gite et le couvert sur les campus. Celui-ci peut-être très élevé, de l’ordre de 10 000 dollars par an. En échange, les facs rivalisent d’imagination pour attirer les étudiants avec des campus plus beaux les uns que les autres et des lieux de restauration faits pour que les parents et les enfants lorsqu’ils font le tour des campus avant de choisir, se pâment devant l’offre. En ce moment les sushis bars font fureur – j’ai d’ailleurs appris par un étudiant d’ici, professeur de français dans un lycée privée près de Boston, dont les tarifs dépassent les 60 000 dollars par an, que là-bas aussi les suRésultats de recherche d'images pour « sushi bar »shis étaient à volonté. Cela pour dire que demander à ses enfants de financer le room and board signifie qu’ils devront trouver 1000 dollars par mois s’ils ne les ont pas économisé avant. Nos amis ont préféré laissé ce temps à leur fille pour travailler, et nous disent-ils, elle remplit sa part du contrat car elle a d’excellents résultats.

Cela me rappelle des choses que j’ai lues sur les transferts d’argent entre parents et enfants, analyses qui traitaient de la France, mais qui me semblent assez universelles : chaque famille organise son système de don et de contre-don dans un contexte de famille “relationnelle” comme l’appelle François de Singly, qui veut dire que la famille se voit comme un lieu d’épanouissement et d’autonomie de chacun, et c’est cela qui est valorisé dans le don et le contre-don. Ce modèle est bien sûr celui de la classe moyenne, qui par ailleurs considère que la réussite scolaire est la voie de l’insertion sociale. Certaines familles font le choix de prêts monétaires, remboursables par les enfants plus tard, quand d’autres considèrent que le contre-don est l’implication dans le travail. Certains parents estiment que l’éducation des enfants passe par leur participation aux frais et leurs demandent de travailler, mais cela est présenté non comme une demande économique mais bien comme une exigence pédagogique (surtout si les parents auraient les moyens de faire autrement, ce qui est plus souvent le cas en France où les études ne coûtent pas aussi cher qu’ici). Il peut y avoir des ratés, et les conflits naissent lorsque les parents ont le sentiment que l’enfant ne prend pas suffisamment au sérieux le don des parents, ou inversement que l’enfant estime que ses parents ne respectent pas la norme d’autonomie et font trop sentir leur volonté de voir leur investissement “rentabilisé”, voire “remboursé”. Bref, si l’aspect monétaire est trop visible.

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Nos hôtes semblent avoir trouvé un équilibre qui les satisfait. Toutefois, les frais des années supplémentaires (qu’ils n’avaient donc pas économisés) correspondent à 2/3 du salaire de professeur d’université de notre ami, de sorte que sa femme, pédiatre à l’hôpital, qui avait pris sa retraite, s’est remise à travailler. Elle dit d’ailleurs qu’elle en est heureuse. Le seul petit détail qui pourrait fâcher, est que leur fille ne veut pas que ses camarades sachent qu’elle n’a pas fait d’emprunt, car elle pourrait apparaître comme une enfant gâtée.

L’une des explications souvent données quant au prix des soins ici est que les médecins ont contracté de très lourdes dettes pendant leurs études et sont obligés de générer d’importants revenus pour les rembourser. Décidément, la question du prix des études est centrale.

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Apprendre l’argent dans le journal

La plupart des journaux aux Etats-Unis possèdent une rubrique centrée sur l’argent: « Your Money » dans le NY Times, « The color of Money » dans l’édition du week-end du Washington Post (reprise dans une centaine de journaux à travers le pays) ou « Money » dans Time Magazine, etc. Plutôt que des courriers du cœur, certains journaux ont des courriers des problèmes d’argent. Ces pages très bien fournies sont un lieu idéal pour observer cette fameuse « financiarisation de la vie quotidienne », dont je parlais dans un post précédent.

Capture d_écran 2017-08-03 à 17.11.56Si l’on considère que les sujets traités par les journaux reflètent les centres d’intérêt des habitants d’un pays – c’est un débat, Pierre Bourdieu considérait que le processus inverse est en général à l’œuvre, mais pour ce blog, nous allons faire comme si – ces pages sont extrêmement précieuses. Les sujets sont multiples mais les plus fréquents sont les dettes et les moyens de les réduire, le financement des études, les retraites et les choix d’investissement (ce dernier sujet recoupant les trois autres en réalité). D’autres articles présentent la situation sociale des plus âgés, des portraits de retraités obligés pour survivre d’occuper des emplois payés au salaire minimum à 80 ans passés. Mais il y est aussi parfois question de la vie financière des très riches – ce qui me fait penser aux présentations admiratives de voitures de luxe dans les magazines automobiles.

On perçoit par ces lectures l’inquiétude que représente le coût des études pour les familles états-uniennes. Non seulement des articles sont régulièrement consacrés au prix des universités : celle-ci a augmenté ses tarifs, celle-là propose une nouvelle bourse, tel Etat a décidé d’aider ses ressortissants s’ils étudient dans l’Université publique locale, etc ; mais le plus souvent ce qui est au cœur du sujet est la façon fullsizeoutput_438dont les étudiants et leurs familles y font face (une photo de la bibliothèque de Middlebury, puisque je parle d’universités). Des reportages sont consacrés aux calculs des familles : choisir telle université plus prestigieuse mais qui coûte davantage ou celle-ci plus économique mais peut-être moins bonne pour l’avenir ? Emprunter ou économiser ? Comment calculer les bourses auxquelles l’étudiant peut prétendre (sujet éminemment complexe, chaque université et chaque Etat a des modalités de calcul différentes) ? Comment les étudiants vivent-ils le fait de faire peser sur leurs familles de telles contraintes financières ? Un autre sujet est celui de la pauvreté des étudiants, et enfin la question des dettes contractées pendant les études revient très régulièrement.

Certains journaux ouvrent leurs colonnes à des universitaires, économistes, politistes, juristes (rarement sociologues, rassurez-vous), qui donnent leur avis sur les meilleurs système de retraite, protection sociale, financement des études, crédit, protection des consommateurs, etc, et les réformes que le gouvernement devraient amorcer. Un article récent du NY Times était ainsi consacré à se demander si arranger ses comptes, aidé par un avocat, pour devenir en toute légalité éligible à Medicaid – l’assurance santé publique réservée aux personnes âgées les moins riches – était éthiquement condamnable. Cet article était signé de Ron Lieber, qui est l’éditorialiste de la rubrique « Your Money » du prestigieux journal et qui s’est fait connaître par ses ouvrages d’éducation à l’argent. C’est le cas de la plupart de ceux qui écrivent dans ce type de pages, ou qui y sont cités : ces spécialistes de la gestion des budgets familiaux et de l’éducation à l’argent se sont en général faits connaître par des livres à succès. C’est le monde du coaching financier qui apparaît ici. C’est une industrie florissante – quelques livres ci-dessous trouvés au hasard parmi une myriade -, ce qui est évidemment à relier à l’inquiétude de la classe moyenne pour réussir à maintenir son niveau de vie et à le transmettre. Et ces pages que les journaux y consacrent mettent en scène cette inquiétude tout en présentant les « experts » capables d’y répondre.